By jeanmarcmorandini.com
Santé

Médecins du Monde lance une campagne d'affichage qui dénonce les marges des laboratoires pharmaceutiques


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Aujourd’hui le marché du médicament est plus lucratif que l’industrie pétrolière. Ses taux de marge nette sont deux fois supérieurs à la moyenne du secteur industriel. Or les médicaments ne sont pas des biens de consommation courante, comme le téléphone portable ou les vêtements.

Les prix aussi exorbitants qu’injustifiés des traitements contre le cancer ou l’hépatite C pèsent lourdement sur les systèmes de santé solidaires qui doivent les supporter. À terme, c’est l’accès aux soins pour tous qui est menacé.  lance une campagne pour dénoncer cette dérive et réclamer que l’État intervienne pour faire baisser les prix des médicaments.

 

 

 

Les autorités qui fixent le prix d’un médicament acceptent généralement de s’aligner sur les tarifs exigés par les firmes pharmaceutiques et déterminés en fonction de la capacité des États à payer. En somme, plus un État est riche, plus le prix d’un traitement sera élevé. De plus les industriels du médicament détournent les principes du brevet. Alors qu’il a été conçu comme un outil pour garantir une juste rémunération de l’inventivité, le brevet est au­jourd’hui utilisé pour imposer un rapport de force dans la négociation avec les États afin d’obtenir des prix plus élevés et des situations de monopole. Accessoirement, cette dérive tend à diminuer considérablement l’innovation ; 74 % des médi­caments mis sur le marché depuis 20 ans n’ap­portent aucun bénéfice thérapeutique par rapport à des molécules existantes. Mais tout cela est possible car les agences d’État impliquées dans la mise sur le marché des médi­caments souffrent d’un profond manque de trans­parence, voire de conflits d’intérêt.

« Plus un État est riche, plus le prix d’un traitement sera élevé. » LE CAS DE L’HÉPATITE C

Au début des années 2010 sont apparus de nouveaux traitements contre le virus de l’hépatite C : les antiviraux à action directe (AAD), qui permettent d’envi­sager une élimination de la maladie. Formidable espoir pour les 80 millions de personnes infectées dans le monde, dont environ 230 000 en France. Mais lorsqu’en novembre 2014 le premier de ces AAD, le sofosbuvir, est mis sur le marché, c’est la douche froide. Avec un prix de vente fixé par le gouvernement à 41 861,40 € la cure de 12 semaines, traiter toutes les personnes concernées en France coûterait 10 milliards d’euros… 10 milliards, c’est presqu’un tiers des dépenses an­nuelles totales consacrées au médicament en France. 10 milliards, c’est le montant des économies atten­dues pour l’assurance maladie dans le cadre du plan gouvernemental d’économies 2015-2017.

Pour la première fois depuis la création de la Sécurité sociale universelle en 1945, l’État a décidé de rationner l’accès à un traitement efficace pour des raisons uniquement budgétaires. « L’État doit réinvestir son rôle de régulateur pour fixer la norme. »

Jamais de tels écarts entre les coûts de production et de recherche et développement n’avaient été atteints dans notre pays. Le coût de production du sofosbuvir, intégrant une marge bénéficiaire de 50 % pour le laboratoire, est estimé à moins de 100 € en utilisant des versions génériques homologuées qui existent dans plusieurs pays.

Le laboratoire pharmaceutique justifie le prix du sofosbuvir par les économies réalisées sur les soins aux malades de l'hépatite C, notamment sur le coût d'une greffe de foie. Un peu comme si le comprimé d’aspirine était vendu 1 000 € parce qu’il réduit les risques cardiovasculaires et permet d’éviter des interventions chirurgicales car­diaques…

Ce changement de paradigme met clairement en danger la pérennité de nos systèmes solidaires de santé. Là encore, l’État doit réinvestir son rôle de régulateur pour fixer la norme.

"Depuis deux ans, Médecins du Monde n’a cessé d’alerter les pouvoirs publics. Sans réponse. C’est pourquoi nous avons décidé, en février 2015, d’utiliser la seule arme du droit à notre disposition pour faire entendre notre voix : l’opposition au brevet. Cette action judiciaire peut permettre d’ouvrir la voie à l’utilisation de médicaments génériques beaucoup moins chers. Le jugement de ce recours juridique est attendu les 4 et 5 octobre 2016."

Source: Médecins du Monde

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